Religion et magie dans la Rome antique
RELIGION ET MAGIE DANS LA ROME ANTIQUE,
DEUX ASPECTS DES MÊMES PRATIQUES RITUELLES
C’est avec un plaisir renouvelé que l’ALPLG, que j’ai l’honneur de présider, accueille ce soir le Professeur John Scheid dans le cadre de son cycle de conférences annuelles.
Le Professeur Scheid est un éminent spécialiste de religion romaine, titulaire de la chaire « Religion, institutions et société de la Rome antique » de 2001 à 2016, jusqu’à son honorariat, qui ne signe pas l’arrêt de ses activités scientifiques, mais qui constitue une nouvelle étape de sa vie d’homme et de chercheur que vient de couronner sa très récente élection en tant que membre de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. C’est donc un Immortel que nous écouterons tout à l’heure !
Parmi ses très nombreuses publications, mentionnons notamment son ouvrage sur les frères arvales (Romulus et ses frères, 1990, et l’édition des procès-verbaux épigraphiques 1998), les Res gestae Diui Augusti, ses travaux sur la religion (en dernier lieu Quand faire c’est croire [2011] – Les Dieux, l’Etat et l’individu. Réflexions sur la religion civique à Rome [2013]. Très attaché à Plutarch. Römische Fragen (2012) ainsi qu’À Rome sur les pas de Plutarque (2012), il travaille actuellement à la publication de la topographie générale du site de La Magliana (Rome, bois sacré des frères arvales) et de Djebel Oust (Tunisie). Par ailleurs, il publie avec des collaborateurs français et italiens un inventaire des lieux de culte de l’Italie antique, et s’intéresse dans ce contexte aux variations du paysage religieux du VIIe siècle avant au VIIe siècle après J.-C.
La magie occupe dans les coutumes cultuelles la même place que les autres obligations rituelles, la religio comme disaient les Romains. De la même manière que les autres pratiques religieuses, publiques ou privées, des Romains n’étaient pas commandées par une révélation venue des dieux, mais prescrites par les autorités temporelles dans le cadre du code de conduite correct, sur terre, avec les divinités, les pratiques magiques étaient des initiatives qui comptaient établir avec les dieux des relations plus fortes, pour les pousser à porter aide à ceux qui les vénéraient de cette manière. C’étaient les mêmes rites, mais pratiqués de manière plus « musclée ». La magie, malgré ses symboles et discours inquiétants, ne s’adressait pas au diable ou à un démon, opposé au dieu créateur, dans le contexte de l’au-delà métaphysique, dans lequel l’adorateur du diable perdrait son âme. La religion romaine, publique ou privée, ne concernait pas la survie de l’âme, mais de la vie et du succès dans ce monde ci, où dieux et humains étaient partenaires. Une figure comme Faust est impensable dans le monde gréco-romain. Celui qui recourt à la magie n’encourt pas de sanction métaphysique, mais éventuellement policière s’il est prouvé qu’il fait un tort physique et matériel grave à un concitoyen.
Franck COLOTTE
(Président de l’ALPLG – 12.12.2016)